1991 Initiales

Texte paru dans le catalogue de l'exposition "Initiales" à la MAPRA, Lyon, mars 1991.

Le travail de Philippe Noulette s'appuie sur la répétition: autrefois, la répétition du geste qui entraînait la raclette croisant la peinture sur la toile: le mot clé était déjà croisement. Croisement de la peinture entre les traits horizontaux et verticaux. Mais aussi, lors de l'exposition à Angle où les peintures étaient présentées face à face, des regards qui reliaient les toiles entre elles pour les faire devenir uniques.
Aujourd'hui, répétition du tressage: les croisements sont beaucoup plus matérialisés, formalisés par le tressage de baguettes de bois, par les clous et vis très dorés qui les lient. Par le tressage de planches légères où le croisement se fait alors sans avoir besoin de clous. Volumes muraux en quelque sorte.
Le cadre dont il entoure ces tressages est un autre arrêt. Auparavant la tranche de la toile était le lieu des coulures témoignant de la peinture entrecroisée. Aujourd'hui, dissimulée par le cadre, elle donne au travail ses limites et sa planéité. Et si les oeuvres se séparent du mur, elles retrouvent malgré tout des positions d'équilibre, des liens...
Le noir qui a peu à peu remplacé bleus et bruns reste malgré tout multiple: il joue sur l'opposition entre l'opacité et la transparence, sur la matité et la brillance mais aussi sur la différence de matérialité des bois brûlés, peints ou coloriés. Couleur cherchant dans son absence à redonner aux volumes une unité, une abstraction.
Quand au format des oeuvres, les 189 centimètres qui leur servent de mesure de base sont une variation, divisés ou multipliés, sur la propre taille de l'artiste.
Constructions sans hasard, les peintures/sculptures se développent dans cet ensemble de données où la poésie s'est introduite. Ce qui nous conduirait à penser qu'il pourrait s'agir tout simplement d'une série d'autoportraits.

Martine Sadion